vendredi 20 avril 2012

Messe chrismale dans le diocèse de Lokossa


La traditionnelle messe chrismale qui se déroule tous les mercredis saints, messe au cours de laquelle sont bénies les huiles des catéchumènes et des malades, où le saint chrême est consacré et où les prêtres renouvellent devant l’évêque et le peuple de Dieu leurs promesses sacerdotales, a été préparée, cette année, d’une manière très originale. En effet, sur invitation de l’évêque, la quasi-totalité des prêtres du diocèse se sont rassemblés au Centre Henri VOGNONDE dans l’après-midi du mardi 04 avril pour une soirée de réconciliation et d’adoration du Très Saint Sacrement. Tout a commencé aux environs de 18h avec le chant des Vêpres suivi par la célébration pénitentielle communautaire. Elle fut présidée par le Père Luc ZINGAN, un des benjamins du presbyterium et le Père Jacques AMOUSSOU, doyen d’âge du clergé de Lokossa. C’est à ce dernier qu’est revenu le devoir de conduire l’examen de conscience, prélude de la confession individuelle qui a suivi. De 21h à 00h, ce fut l’adoration du Saint Sacrement. A noter que l’évêque et la quatre vingtaine de prêtres présents ont tous dormi au Centre Henri VIGNONDE qui s’est rajeuni d’un bâtiment à deux étages flambant neuf. Et c’est de là que le lendemain, après les offices des Lectures et les Laudes, tous les prêtres se sont rendus à la Cathédrale Saint Pierre-Claver à 9h15mn, pour la Messe Chrismale.


HOMÉLIE DE MGR A LA MESSE CHRISMALE
Frères très chers et bien-aimés dans le sacerdoce ministériel, Fils et filles, chrétiens et chrétiennes de notre Eglise-famille du diocèse de Lokossa,
1- La célébration de ce matin nous ouvre grandes les portes du triduum pascal, instants où nous sommes conviés à revivre, je dirais à fond, le mystère de notre rédemption dans le Christ. Le salut est à nos portes. Le Christ, le Souverain prêtre, vient à nous, dans la célébration des mystères de notre salut et nous apporte les signes de vie qui nous permettent de vivre avec lui et en lui. C’est d’ailleurs ce que nous nous sommes venus réaffirmer ce jour dans cette messe où seront bénies ou consacrées les huiles qui serviront pour divers sacrements. Par ces signes de notre foi, le Christ, le Messie de Dieu, continue de nous renouveler sa fidélité et de nous assurer secours et force pour notre traversée d’ici bas. Il signifie, par ces huiles, qu’il reste celui sur qui « repose l’Esprit du Seigneur » et que de lui et de lui seul découlent toutes les grâces de Dieu pour notre monde : « en dehors de Lui, il n’y a pas de salut. Et son nom, donné aux hommes, est le seul qui puisse nous sauver ». (Actes 4,12). C’est à lui que les fidèles sont incorporés par leur baptême. C’est en lui que nous pouvons nous aussi nous réjouir d’être « les prêtres du Seigneur », les « serviteurs de notre Dieu » selon la belle expression du prophète Isaïe, non pas les cérémoniaires de Dieu, mais les liturges de l’alliance que Dieu veut conclure avec les hommes. « Serviteurs de notre Dieu, liturges de l’alliance », il n’est pas de plus beau nom que cela, frères et
sœurs, si nous savons accorder à ce privilège tout son sens et toute sa densité. Comme prêtres et serviteurs, nous sommes ceux avec qui et par qui le Christ veut aujourd’hui porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, guérir ceux qui ont le cœur brisé, annoncer aux prisonniers la délivrance et aux captifs la liberté. Cette mission nous incombe, tous, chrétiens et chrétiennes engagés à la suite du Christ ; mais elle nous incombe plus particulièrement, à nous, frères bien-aimés que le Christ a voulu associer plus étroitement à son ministère sacerdotal. Aussi voudrais-je ici me tourner particulièrement vers vous en ce jour où vous renouvelez vos promesses sacerdotales.
2– La tâche à laquelle le Christ nous appelle est d’une telle importance et urgence que nous ne pouvons nous permettre quelques distractions en route « Ne vous attardez pas en salutations longues sur le chemin » : être avec lui ceux qui se dévouent au salut de leurs frères et sœurs. Cette mission, comme vous le savez déjà ou comme vous en faites l’expérience, est exigeante autant hier qu’aujourd’hui. À la suite du Bon Samaritain, il nous faut, pour aller vers les pauvres, les affligés et les prisonniers de notre temps, risquer notre vie sur une route qui, comme jadis celle qui mène de Jérusalem à Jéricho, n’est pas exempte de dangers. Vous vous acquittez sans doute au mieux de cette tâche, dans des conditions qui, nous le savons tous, ne sont pas les meilleures. En ce jour solennel, permettez-moi à nouveau de vous féliciter et de vous encourager.
La situation du prêtre dans notre diocèse aujourd’hui, il est vrai, pose de véritables problèmes spirituels, matériels et éthiques auxquels nous sommes invités à apporter humblement des réponses personnelles et responsables, individuelles et collectives sans cependant perdre de vue que notre ministère doit son efficacité non d’abord aux prospectives humaines savamment élaborées mais à une communion et à une intimité profondes et constantes avec le Christ
qui nous a appelés et nous a choisis. Ainsi, notre situation, chers confrères, ne doit pas être exploitée comme une plate-forme de révolte, même si celle-ci n’est pas toujours manifeste, ou comme un prétexte pour manquer de faire la vérité en nous-mêmes et reconnaître humblement nos fausses conceptions de la charge presbytérale.
3- L’Esprit du Seigneur nous a choisis et consacrés par l’onction, faisant de nous des instruments de salut. Mais cet appel est à renouveler sans cesse pour ne pas tomber dans la routine du fonctionnariat sacerdotal et pour ne pas vieillir. C’est d’ailleurs là l’enjeu du renouvellement de vos promesses en ce jour : non pas une simple formalité liturgique, mais l’occasion d’exprimer
au Seigneur votre désir de persévérer à son service d’annonce de la Bonne Nouvelle aussi bien par vos paroles que par votre exemple ; de persévérer à son service de consolation et de libération par la célébration digne des sacrements et le soutien aux plus faibles, de rendre votre charité pastorale crédible et accessible à tous. Vous comprenez aisément pourquoi j’ai voulu cette année, que nous nous préparions spirituellement à ce geste par une soirée de prière et de méditation : « Venez vous-mêmes à l’écart, dans un lieu désert, et reposez-vous un peu » (Mc 6,31). Vous avez volontiers répondu à ce rendez-vous qui, j’en suis certain, ne restera pas sans fruits autant pour vous-mêmes que pour ceux dont vous avez la charge. Veuillez considérer cela comme un rituel d’envoi nouveau à votre mission, un peu à l’instar de ce que fit Jésus et que Marc rapporte comme un véritable rituel d’intronisation : « Il gravit la montagne et il appela ceux qu’il voulait. Ils vinrent à lui et il en établit douze pour être avec lui, et pour les envoyer prêcher avec le pouvoir de chasser les démons » (Mc 3,13-15).
4 - Quant à notre contribution concrète au progrès de l’annonce du Royaume, les statistiques et les manifestations médiatiques de notre Église ne doivent pas nous donner bonne conscience de notre engagement ; doivent nous inquiéter le déficit en croissance de bien de nos communautés, le manque de vitalité de bon nombres d’entre elles, la diminution des vocations sacerdotales et religieuses, sans parler, dans nos rangs, des faiblesses et des récessions qui, à vues humaines, ne peuvent plus être dissimulées et qui constituent certainement des freins à l’annonce de l’Évangile. Devant le projet de Dieu auquel il a voulu nous associer gratuitement, et devant les difficultés inhérentes à cette mission, nous ne devons cependant avoir peur ; il nous veut forts, il nous veut des hommes de foi qui animent les faibles et les timides. Il ne dort pas, mais il veille. C’est lui qui nous ordonne d’aller en avant. C’est lui le Timonier de la barque de l’Église, le Maître du Champ et le Responsable de l’embauche. Je crois profondément que seul le recentrage de notre vie sacerdotale sur Lui, Jésus, qui semble dormir à l’arrière, parce que nous ne lui faisons pas confiance et ne comptons plus suffisamment sur lui, seul le recentrage sur lui doit être notre force et notre lumière devant les faiblesses devenues trop évidentes… Sans être présomptueux, il nous faut nous en remettre dans l’amour et dans le don total de nous-mêmes. Seul l’amour a du poids, seul il donne du poids à nos vies. Nous ne devenons aptes à la mission, et à la mission
ensemble, que lorsque nous devenons de plus en plus amoureux de Jésus et de son Église, de nos frères et sœurs.
5 - En ces temps où l’Église en Afrique pense et médite sa mission de réconciliation, de justice et de paix, notre ministère, chers Prêtres, doit apparaître comme une vivante annonce de la Bonne Nouvelle de réconciliation de justice et de paix. Mais comment porter cette Bonne Nouvelle à nos frères et sœurs si nous-mêmes ne la vivons pas intensément au plus profond de nous-mêmes
et entre nous, membres d’un même et unique presbyterium ? Avec le pape Benoît XVI, je vous lance ici un appel : « Chers prêtres, souvenez-vous que votre témoignage de vie pacifique, par-delà les frontières tribales et raciales, peut toucher les cœurs » (Africae Munus 108). Le sacerdoce que le Christ nous fait partager doit être la frontière imposée à toutes formes de divisions d’où qu’elles proviennent. Nous sommes envoyés communiquer aux fidèles, non pas nos convictions partisanes, mais leur donner la certitude que Dieu leur apporte le salut. Comme le conseille si bien le Pape, Céder à la tentation de nous transformer en guides politiques ou en agents sociaux, serait trahir notre mission sacerdotale et desservir la société qui attend de nous des paroles et des gestes prophétiques. L’année de grâce accordée par le Seigneur et dont nous sommes les messagers n’est pas une révolution sociale ou ethnique dont nous serions les leaders mais une révolution des cœurs libérés du péché et tout tournés vers Dieu. Soyez donc ceux dont la présence incarne Celui qui vous a associés à son ministère, soyez des hommes d’espérance, de réconciliation, de justice et de paix.

En mina
Et vous Frères et Sœurs bien-aimés, laissez-moi vous confier une fois encore ces prêtres à votre service. Priez pour tous les prêtres et surtout pour ceux qui vous ont apporté le Christ… Que vos prières les soutienne fermement afin qu’ils soient les hérauts de la Bonne Nouvelle qu’ils vous annoncent et que leur unité soit pour vous une constante invitation à vivre dans l’amour et dans la charité. Amen.

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